POISSONS OSSEUX Malacoptérygiens

Famille des Salmonidés

GENRE SAUMON, Salmo - Linné.

Tête de moyenne grosseur ; yeux latéraux, relativement petits ; mâchoire inférieure relevée en forme de crochet chez les mâles, au moment du frai ; corps et queue allongés, un peu comprimés ; écailles petites. Nageoire dorsale assez élevée mais peu large, portée par 3 rayons simples et environ 11 rameux ; une très petite nageoire adipeuse, sans rayons, située entre la nageoire dorsale et la caudale, mais plus près de celte dernière ; pectorales assez développées, portées chacune par 2 rayons simples et 11 ou 12 rameux ; ventrales situées en face de la moitié postérieure de la dorsale, munies chacune de 2 rayons simples et 8 rameux ; anale portée par 3 rayons simples et 8 ou 9 rameux ; caudale bien développée, échancrée. Ligne latérale presque droite, composée de 110 à 120 écailles.

23. — Saumon commun, Salmo salar - Linné.

Saumon atlantique, Salmo salar

Parties supérieures brunâtres, marquées de gros points noirs et de grandes marbrures noirâtres ; flancs d'un blanc rose, argentés, piquetés de points roses ou rougeâtres ; dessus de la tête d'un brun verdâtre. Parties inférieures d'un blanc jaunâtre. Dorsale et caudale d'un brun légèrement bleuâtre ; adipeuse brune ; les autres nageoires bleuâtres chez les adultes, d'un brun jaunâtre chez les jeunes. Iris d'un brun verdâtre doré. Ce Poisson peut peser 25 kilogrammes et même plus.

Les Saumons qu'on prend dans nos contrées pèsent en général de 8 à 15 livres, mais nous avons vu une femelle de 32 livres et un Bécard de 22 livres capturés dans la Creuse, aux environs de Saint-Gaultier et d'Argenton.

Les Saumoneaux qu'on pêche dans la Creuse, au moment de leur migration vers la mer, sont connus à Argenton et au Blanc sous le nom de Tacots ou Tacons ; ils ont de 10 à 21 centimètres de longueur. Ces Tacons ont les parties supérieures brunes ou d'un brun bleuâtre, avec de gros points noirs ; huit, neuf ou dix grandes taches d'un noir bleuâtre, plus ou moins apparentes, descendent jusqu'au-dessous de la ligne latérale, qui est presque droite et marquée de six, huit ou neuf gros points rouges s'éloignant peu de cette ligne. Les flancs sont légèrement dorés ou très argentés et les parties inférieures ont cette dernière teinte. Les pièces operculaires sont dorées ou argentées et souvent marquées de trois taches noires. L'iris est doré. On les reconnaîtra des Truites par leur nageoire caudale toujours échancrée, celle de la Truite étant ordinairement presque droite lorsqu'on la tend entre les doigts.

Le Saumon aime les rivières à eaux vives ; aussi le trouve-t-on assez souvent dans la Creuse et l'Anglin, alors qu'il est rare dans le Cher et qu'il n'existe pas ou est extrêmement rare dans la Bouzanne, la Claise, l’Indre, la Théols et le Fouzon.

Par la Creuse, malgré les barrages, malgré les pêcheurs qui leur font une poursuite continuelle, d'assez nombreux sujets remontent jusque dans le département de l'Indre et gagnent le département de la Creuse où ils vont se reproduire. Dès le mois de juillet, dans nos contrées, on prend des individus qui montent, descendent, remontent, jusqu'à ce qu'en octobre, novembre, décembre et janvier ils se décident à se rendre le plus haut possible vers les sources de la rivière pour y frayer.

Ce Poisson se déplace avec une grande rapidité et profite des crues pour voyager.

C'est au moment où ils remontent pour se reproduire qu'on prend un assez grand nombre de Saumons dont les mâles, appelés Bécards, sont facilement reconnaissables par leur laitance énorme et par l'extrémité de leur mâchoire inférieure relevée en forme de crochet ; les femelles sont pleines d'œufs, mais très rarement elles ont la mâchoire recourbée comme chez les mâles.

Arrivés aux frayères, les voyageurs choisissent un endroit favorable et bientôt les femelles, aidées des mâles, creusent de petites excavations allongées en se frottant le ventre sur le sable ou le gravier. Selon sa taille, la femelle dépose dans cette cavité un nombre d'œufs plus ou moins considérable ; le mâle les féconde aussitôt et les amoureux recouvrent parfois la ponte au moyen des matériaux qu'ils ont enlevés en creusant le sillon. D'après le professeur E. Blanchard, l'incubation dure de 90 à 140 jours selon la température. Les jeunes Saumoneaux portent pendant cinq semaines environ la vésicule qui sert à les nourrir ; ils vivent ensuite d'Insectes, de frai, et plus tard de petits Poissons. Ils restent dans les parties hautes de la rivière jusqu'à l'âge de quinze ou seize mois et, en avril ordinairement, se mettent à descendre vers l'Océan, souvent au moment des crues. Dans ce voyage plein de périls, d'innombrables sujets tombent dans les engins des pêcheurs : un habitant d'Argenton a pris huit cent quarante Tacons en quelques heures. Ceux qui ont eu la chance d'arriver à la mer y restent quelques mois, se développent considérablement pendant ce court espace de temps, et ensuite reviennent dans l'eau douce pour regagner plus ou moins vite les contrées où ils sont nés et où ils iront se reproduire. Chez cette espèce, les mâles sont plus précoces que les femelles.

Les Saumons qui sont allés frayer dans la Haute Creuse traversent de nouveau notre département en décembre, janvier ou février ; ils sont alors très fatigués, très maigres, et bien souvent quelques individus meurent en route.

Parfois, jusqu'en mai, on prend de rares traînards qui, pour une cause qui nous est inconnue, n'ont pas émigré aux mêmes époques que leurs semblables ; ces Saumons, ainsi que ceux qui arrivent en juillet, fréquentent le voisinage des sources et les courants. Peut-être les adultes qu'on rencontre après l'époque de la descente vers la mer sont-ils des sujets qui, n'étant pas préparés pour reproduire, attendent dans l'eau douce jusqu'à l'automne suivant.

Le Dr L. Bureau, de Nantes, dit que le Saumon n'est apte à la reproduction que tous les deux ans, alors que le Dr E. Moreau croit que la reproduction est annuelle, au moins pendant un certain temps. On voit qu'il y a encore beaucoup à observer avant de connaître exactement les mœurs de ce Poisson.

Les Tacons, eux aussi, ne descendent pas toujours en avril ; ceux d'entre eux qui ne sont pas assez développés attendent les crues de novembre pour gagner l'eau salée, aussi en prend-on assez souvent à cette époque.

Le Dr E. Moreau, dans son Manuel d'Ichtyologie française, prouve que le Saumon peut vivre et se reproduire dans les lacs d'eau douce, que l'eau de la mer ne lui est pas absolument indispensable, et il cite les expériences concluantes qui ont été faites à ce sujet. Pourquoi un amateur intelligent, ami de la Nature, n'essaierait-il pas de s'entendre avec les propriétaires de quelques-uns de nos immenses étangs de Brenne, véritables lacs aux eaux limpides, et pourquoi ne tenterait-il pas d'y élever ce magnifique Poisson ? À défaut d'amateur, l'administration pourrait essayer de mener à bien cette utile expérience.

GENRE TRUITE, Trutta - Nilsson.

Tête assez grosse ; yeux de moyenne grandeur ; corps et queue peu allongés, assez comprimés ; écailles petites. Nageoire dorsale munie de 3 rayons simples et 10 rameux ; nageoire adipeuse petite, peu éloignée de la caudale ; pectorales portées par 1 rayon simple et 12 rameux ; ventrales situées en face de la partie postérieure de la dorsale, portées par 2 rayons simples et 8 rameux ; anale assez allongée, portée par 2 ou 3 rayons simples et 8 ou 9 rameux ; caudale bien développée, droite ou très peu échancrée. Ligne latérale presque droite, formée de 110 à 120 écailles, parfois plus.

24. Truite commune, Trutta fario - Von Siebold.

Truite commune, Salmo trutta fario

Parties supérieures d'un brun olivâtre tacheté de noir ; parties inférieures d'un blanc jaunâtre métallique ; côtés plus ou moins marqués de points rouges. Nageoire dorsale brune, avec de gros points noirs ; caudale d'un brun foncé, anale plus claire ; pectorales et ventrales d'un brun jaunâtre ; iris ordinairement doré, parfois teinté de brun. Des sujets ont une coloration foncée ; d'autres, au contraire, ont des couleurs très claires et très brillantes.

La Truite peut peser 10 kilogrammes, mais on en prend rarement de ce poids dans nos eaux.

Commune dans la Creuse et l'Anglin, elle fréquente le voisinage des sources, des petits cours d'eau, et se tient de préférence près des écluses et dans les courants ; rare dans la Bouzanne, elle s'éloigne peu du confluent de cette rivière avec la Creuse ; rare dans l’Indre, sauf en amont de La Châtre où on la trouve assez communément ; assez rare dans le Cher, et très rare dans la Théols et le Fouzon.

Dans la Creuse, où elle est très commune en amont d'Argenton, elle fraye en novembre, décembre et janvier, sur les bords des écluses et dans les courants ; à cette époque, elle vit par bandes nombreuses. En mars et avril, bon nombre de sujets descendent la rivière et exécutent de petits voyages, montant ou descendant selon leur fantaisie, séjournant dans les endroits où la nourriture est abondante.

On prend cette espèce à la ligne ou à l'épervier. Les pêcheurs ont remarqué bien des fois que certaines Truites avaient la chair rose, alors qu'ils prenaient, dans les mêmes endroits, des sujets à chair blanche ; ils donnent le nom de Truites saumonées aux premières et prétendent que la Truite à chair blanche n'est pas la même que celle dont la chair est colorée. Ils sont dans l'erreur, car ces Truites appartiennent à la même espèce.

La Truite commune se nourrit de Vers, d'Insectes et de jeunes Poissons. Sa voracité la pousse jusqu'à avaler des Reptiles : une Truite, capturée à Gargilesse, rendit une petite Couleuvre vipérine !

 

* Nous ne connaissons pas de capture authentique de la Truite de mer, Trutta argentea [Truite saumonée, Salmo trutta trutta], dans les limites du département de l'Indre. Plusieurs pêcheurs nous ont dit qu'ils avaient pris cette espèce dans la Creuse. D'après eux, ce Poisson est extrêmement rare et sa capture tout à fait accidentelle ; ils l'appellent aussi Truite saumonée. Nous pensons que ces pêcheurs ont dû se trouver en présence de grandes Truites communes présentant une coloration spéciale, ce qui leur a fait croire qu'ils venaient de capturer la Truite de mer.

 

* Il en est de même pour l'Ombre commune, Thymallus vulgaris [Ombre commun, Thymallus thymallus]

, que nous n'avons jamais pu avoir entre les mains quoique des pêcheurs nous aient affirmé l'avoir capturée plusieurs fois dans la Creuse, aux environs d'Argenton. Pourtant, nous ne serions pas étonnés de voir une prise de ce genre s'opérer dans le département.

 

Quant à l'Omble-Chevalier, Umbla salvelinus [Omble chevalier, Salvelinus alpinus alpinus], il ne se trouve pas dans nos rivières.

 


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