MAMMIFÈRES INSECTIVORES

Famille des Soricidés

GENRE CROCIDURE, Crocidura - Wagler.

Dents blanches, les incisives médianes supérieures assez développées et très recourbées, les inférieures longues et peu recourbées ; canines petites ; molaires surmontées de tubercules aigus. Yeux très petits ; oreilles petites, arrondies ; museau long, mobile ; corps allongé ; membres courts ; queue moins longue que le corps.

16. Crocidure aranivore, Crocidura araneus - Schreber.

Crocidure musette, Crocidura russula

Pelage brun roux en dessus, gris clair en dessous et blanchâtre vers l'extrémité des membres ; oreilles peu velues, non cachées sous les poils ; queue couverte de poils courts, et parsemée çà et là de quelques longs poils. Tête et corps : 0 m. 075 ; queue : 0 m. 038. Une glande, située sur les flancs, répand une odeur fade chez le mâle ; les poils sont blancs et très courts sur la peau qui recouvre la glande.

La Crocidure aranivore est très commune dans tout le département. On la trouve partout, mais ses lieux de prédilection sont les étables et principalement les fumiers où elle trouve une habitation chaude et une nourriture abondante. En écoutant attentivement près des endroits qu'elle fréquente, on entend de petits cris qui indiquent sa présence à l'observateur.

Très active, il lui faut tous les jours une quantité considérable de nourriture. Elle dévore les Lombrics, les Insectes et leurs larves, les petits Mammifères, les Oiseaux, les cadavres de toute sorte et même ses semblables lorsque la disette se fait sentir.

Elle fait plusieurs portées par an, car nous avons trouvé des femelles pleines et des jeunes de la fin de février à la fin d'octobre. Il y a ordinairement, par portée, trois ou quatre petits qui grandissent vite et sont bientôt en état de reproduire.

Dans nos cages, nous avons souvent eu des sujets de cette espèce et nous avons pu les observer facilement. Nous les nourrissions avec de la viande hachée et des cadavres de petits Mammifères. Lorsqu'il nous arrivait d'oublier de leur donner à manger à l'heure habituelle, il était rare que l'un d'eux ne fût pas mis à mort et dévoré par ses compagnons de captivité. Ces animaux faisaient une large déchirure à l'abdomen des Rats ou des Campagnols que nous leur donnions, dévoraient les viscères, s'introduisaient dans le corps de leur proie, mangeaient les muscles et ne laissaient que la peau et les gros os. Ils étaient vifs, remuants, tournaient de tous côtés leur long museau et grimpaient facilement à la toile métallique de leur prison. Lorsqu'il nous arrivait de renverser la petite boîte pleine de foin haché qui leur servait d'abri, on pouvait assister à un curieux spectacle : au moyen de ses mâchoires, un jeune saisissait sa mère à la naissance de la queue, un second petit s'accrochait au premier de la même façon, et ainsi de suite ; alors la mère se mettait en mouvement et traînait sa progéniture dans la grande cage, cherchant un endroit où cacher son précieux fardeau ; ce manège ne se faisait plus lorsque les petits étaient devenus forts. Malgré de grands soins de propreté, ces animaux répandaient une odeur désagréable.

Nous pensons que cette espèce est monogame, car on trouve ordinairement un mâle et une femelle ensemble.

17. — Crocidure leucode, Crocidura leucodon - Hermann.

Crocidure leucode, Crocidura leucodon

Pelage brun foncé en dessus, blanc en dessous, oreilles peu velues, non cachées sous les poils ; queue plus courte que chez l'espèce précédente, couverte de poils courts, brune en dessus, blanche en dessous et parsemée de longs poils. Tête et corps : 0 m. 075 ; queue : 0 m. 029.

La Crocidure leucode est rare ; nous ne l'avons trouvée qu'aux environs du Blanc.

Elle s'approche moins des habitations que l'Aranivore, habite les broussailles, les vieilles murailles et, d'après le Dr Fatio, elle a des mœurs assez semblables à celles de l'espèce précédente.

Elle vit de Lombrics, d'Insectes de tous ordres et de leurs larves, de cadavres de petits Mammifères et d'Oiseaux.

 

* Nous n'avons pas rencontré dans le département la Crocidure étrusque, Crocidura etrusca Savi (Pachyure étrusque, Suncus etruscus). D'après le Dr Trouessart, la taille de ce Mammifère est très petite ; la queue est aussi longue que le corps sans la tête, couverte de poils courts, avec des poils plus longs, clairsemés ; les oreilles sont assez grandes et il n'y a pas de glandes sur les flancs. Le pelage est d'un gris cendré roussâtre en dessus, d'un gris blanchâtre en dessous ; la tête et le corps ont 0 m. 035 de longueur ; la queue, 0 m. 025. Cette espèce est commune dans les départements méridionaux ; le point le plus rapproché de l'Indre où elle a été capturée est Gannat (Allier), où elle a été signalée par E. Ollivier.

GENRE MUSARAIGNE, Sorex - Linné.

Dents d'un rouge orangé foncé à l'extrémité, les incisives supérieures médianes, assez développées et très recourbées, les inférieures très longues et peu recourbées, canines petites, molaires surmontées de tubercules aigus. Museau allongé, mobile ; yeux très petits ; oreilles petites, velues et presque cachées sous les poils ; corps allongé, membres courts ; queue plus ou moins courte.

18. — Musaraigne carrelet, Sorex vulgaris - Linné.

Musaraigne carrelet, Sorex araneus

Pelage d'un brun noirâtre en dessus, gris très clair en dessous ; pieds d'un brun clair ; queue brune dessus et dessous, couverte de poils fins, ne portant pas de longs poils épars comme chez les Crocidures et terminée par des poils très raides de coloration un peu plus claire. La glande des flancs est recouverte de poils plus longs que chez la Crocidure aranivore. La queue est moins longue que le corps. Tête et corps : 0 m. 068 ; queue : 0 m. 037.

Cette Musaraigne est commune dans les jardins, les champs entourés de haies, sur la lisière des taillis. Elle chasse jour et nuit aux abords de son trou et, le soir principalement, court de tous côtés, en quête d'Insectes, faisant entendre une petite stridulation qui annonce sa présence. Elle attaque tous les petits animaux, Souris, Mulots, Campagnols, Oiselets, Grenouilles, Lombrics ; elle-même est souvent capturée par les Chats, les Belettes et les Putois qui la tuent et semblent hésiter à la dévorer à cause de sa forte odeur. Cette odeur, qui ne la protège pas toujours, peut lui être utile en ce que les Carnivores qui la tuent à l'occasion la recherchent avec moins d'ardeur.

D'après les observations du Dr Trouessart, la femelle bâtit un nid de mousse et de feuilles dans un trou de mur ou sous des racines et, en mai, juin ou juillet, met bas de cinq à dix petits.

 

* Nous n'avons pas observé dans l'Indre la Musaraigne pygmée, Sorex pygmæus Laxmann et Pallas (Musaraigne pygmée, Sorex minutus). Cette Musaraigne est d'un tiers plus petite que l'espèce précédente, elle a les oreilles proportionnellement un peu plus grandes que chez la Musaraigne carrelet et sa queue est plus longue que son corps sans la tête ; ses dents sont d'un rouge orangé foncé à leur pointe.

Le Dr Trouessart a capturé la Musaraigne pygmée dans le Maine-et-Loire, Gentil l'a observée dans la Sarthe ; nous ne désespérons pas de la trouver dans notre département.

GENRE CROSSOPE, Crossopus - Wagler.

Dents d'un rouge orangé foncé à leur pointe ; les incisives médianes supérieures assez développées et très recourbées, les inférieures longues et peu recourbées, canines petites, molaires surmontées de tubercules aigus. Museau allongé, mobile ; yeux très petits ; oreilles petites, arrondies, velues et presque cachées par les poils ; corps allongé ; membres courts ; queue presque aussi longue que le corps sans la tête.

19. — Crossope aquatique, Crossopus fodiens - Pallas.

Crossope aquatique, Neomys fodiens

Pelage brun foncé presque noir en dessus, avec une petite tache blanche peu allongée en arrière de l'œil ; d'un blanc légèrement grisâtre en dessous ; pieds d'un brun grisâtre, bordés de poils courts et très raides ; queue brune dessus, blanche dessous. Tête et corps : 0 m. 087 à 0 m. 095 ; queue : 0 m. 055 à 0 m. 060.

Le Crossope aquatique est commun sur le bord des rivières, des étangs et des ruisseaux marécageux ; on le trouve en abondance dans les fossés situés entre Argenton et le Pêchereau. Il se creuse, dans les berges, des terriers à plusieurs ouvertures, s'empare de ceux du Rat d'eau après en avoir chassé les habitants. Il circule le jour et la nuit, sur terre comme dans l'eau, avec une rapidité telle, qu'il nous est arrivé bien des fois de l'affûter sans pouvoir parvenir à le viser et à lui lâcher le coup de fusil. Il donne mal dans les pièges les plus subtils et nous n'avons pu nous procurer des sujets adultes qu'au moyen de filets à mailles très fines placés devant les ouvertures des terriers ; en introduisant une baguette dans un des trous, ou en défonçant les terriers, il arrive souvent que l'animal, en cherchant à s'échapper, tombe dans les filets. Parfois, plusieurs individus se poursuivent en poussant de petits cris et, à la moindre alerte, sautent à l'eau, plongent avec une vitesse extrême et ne tardent pas à rentrer dans leur trou.

Il se nourrit de petits Rongeurs et de très jeunes Oiseaux, de larves de Batraciens, de Tritons palmés, de Grenouilles, de Poissons, d'insectes et de leurs larves, d'Écrevisses, de Lombrics. En mai, la femelle construit un nid d'herbes sèches, dans son terrier, et y dépose ses petits, au nombre de huit ordinairement ; il y a plusieurs portées de mai à octobre.

Il est dévoré par les Busards et les Hérons, dans l'estomac desquels nous l'avons trouvé.

Nous avons pris, près d'Argenton, la variété Remifer ou Ciliatus qui diffère du type de l'espèce par ses parties inférieures qui sont grisâtres au lieu d'être blanches.

 

Nous n'avons pas vu les Soricidés des différentes espèces sortir au moment des grands froids, aussi pensons-nous qu'ils s'engourdissent pendant les plus mauvais jours de l'hiver.

 


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