MAMMIFÈRES RONGEURS

Famille des Muridés

GENRE RAT, Mus - Linné.

À chaque mâchoire, deux incisives souvent teintées de brun et six molaires à tubercules assez arrondis ; tête assez grosse, museau assez allongé ; oreilles velues et de moyenne grandeur chez le Surmulot et le Rat nain, plus grandes et presque nues chez le Rat noir, le Mulot et la Souris ; yeux de moyenne grandeur, plus ou moins proéminents ; corps assez allongé. Queue longue, annelée, écailleuse ; velue et ayant à peu près la longueur du corps, sans la tête, chez le Surmulot ; peu velue et plus longue que la tête et le corps chez le Rat noir ; velue et un peu moins longue que la tête et le corps chez la Souris ; velue et presque aussi longue que la tête et le corps chez le Rat mulot ; peu velue et un peu moins longue que la tête et le corps chez le Rat nain. Membres assez courts, les antérieurs ordinairement plus courts que les postérieurs ; doigts munis de petits ongles courts et crochus ; le pouce des membres antérieurs est très petit.

25. — Rat surmulot, Mus decumanus - Pallas.

Rat surmulot, Rattus norvegicus

Parties supérieures brunes ou d'un brun roussâtre ou noirâtre ; parties inférieures blanchâtres ; queue d'un brun roussâtre. Tête et corps : 0 m. 25 ; queue : 0 m. 18. Beaucoup de sujets atteignent une plus forte taille.

Le Surmulot, qu'on croit originaire de l'Asie, est très commun dans les villes et rare dans les campagnes. Il fréquente les égouts, les abattoirs et les moulins où il trouve une nourriture abondante. Il est omnivore, circule la nuit et souvent pendant le jour, nage facilement, mange tout ce qu'il trouve, le Poisson, les provisions de ménage, les petits Poulets, les jeunes Pigeons ; il s'introduit dans les clapiers et y dévore les petits Lapins ; il poursuit le Rat noir jusque dans les greniers et le tue sans pitié. Il habite partout où il peut se cacher suffisamment, dans les cavités des parois des égouts, dans les amas de pierres ou de bois, dans les vieux bâtiments, dans les trous de terre qu'il creuse lui-même ; il s'introduit aussi dans le terrier du Campagnol amphibie et, s'il visite ce Rongeur, c'est sûrement pour le voler et au besoin le massacrer, car l'audacieux Surmulot ne vit que de rapines. Très brave, nous l'avons vu, enfermé dans une chambre, se jeter sur des Chiens, les mordre cruellement et les intimider par son attitude. Il ne redoute ni Chat, ni Belette, et comme son habitat le met hors des atteintes des Rapaces, il pullule effroyablement si on ne prend la précaution de le détruire.

On le capture facilement à l'aide de pièges assommoirs amorcés d'un morceau de lard, ou au moyen de nasses en fil de fer dans lesquelles on place un peu de lard ou de pain beurré ; on le détruit aussi à l'aide de Chiens de petite taille dressés pour cet usage.

Nous avons à maintes reprises trouvé, dans des amas de bois ou de paille, le nid avec quatre à douze petits qui grandissent très vite. La femelle fait plusieurs portées par an ; d'après M. Mailles, elle porte vingt jours et demi. Les jeunes naissent nus et n'ouvrent les yeux que le quinzième jour ; ils sont adultes à trois mois.

26. Rat noir, Mus rattus - Linné.

Rat noir, Rattus rattus

Parties supérieures noirâtres, parties inférieures d'un gris noirâtre. Tête et corps : 0 m. 20 ; queue : 0 m. 22.

Très commun dans les greniers des villes et des campagnes ; on croit qu'il est aussi originaire d'Asie. Il ne s'éloigne guère des maisons, mange les grains, les provisions, les cuirs, ronge le linge et le papier.

La femelle fait plusieurs portées par an et met bas, chaque fois, de cinq à neuf petits qui, d'abord nus, se couvrent bientôt de poils noirâtres et ont très souvent quelques poils blancs sur le sommet de la tête.

C'est ordinairement le soir et la nuit que ce Rat circule ; il est alors la proie des Belettes, des Fouines et des Chats.

Nous avons observé dans le département plusieurs individus présentant des cas d'albinisme partiel. Enfin, nous avons pris à Argenton des sujets d'un gris brunâtre en dessus et blancs dessous.

27. Rat souris, Mus musculus - Linné.

Souris grise, Mus musculus

Parties supérieures d'un brun noirâtre ou grisâtre ; parties inférieures d'un gris plus ou moins clair et plus ou moins fauve. Tête et corps : 0 m. 08 ; queue : 0 m. 075.

Très commune dans la plupart des maisons, la Souris pullule partout, malgré ses nombreux ennemis. Elle est omnivore, fait plusieurs portées par an et met bas, sur un nid composé de matériaux de toutes sortes, de six à neuf petits qui grandissent vite. D'après le Dr Trouessart, la gestation est de vingt-deux à vingt-quatre jours et les jeunes peuvent reproduire dès l'âge de trois semaines.

Nous avons pris à Argenton et au Blanc des individus albinos. D'autres sujets de couleur isabelle ont été capturés à Saint-Gaultier ; un certain nombre d'individus ayant cette coloration ont été pris dans la même maison.

28. — Rat mulot, Mus sylvaticus - Linné.

Mulot sylvestre, Apodemus sylvaticus

Parties supérieures d'un brun foncé sur le dos, plus claires sur les flancs ; queue d'un brun noirâtre dessus, blanchâtre dessous ; une marque noirâtre au talon. Parties inférieures blanches chez les adultes, grisâtres chez les jeunes. Tête et corps : 0 m. 095 ; queue : 0 m. 09.

Extrêmement commun dans les campagnes en certaines années, assez commun seulement en d'autres ; nous avons remarqué que ce Rat, ainsi que les différentes espèces de petits Rongeurs qui vivent dans des terriers, était plus abondant pendant les années sèches que pendant les années humides.

Le Mulot habite les bois, les haies, les champs, vit dans les terriers qu'il se creuse et dans lesquels il amasse des graines en prévision des mauvais jours. C'est un véritable pillard qui dévaste les blés sur pied, les avoines et, après les récoltes, déterre les glands et les châtaignes semés par l'Homme, mange les fruits, les Insectes, et dévore les œufs et les petits des Oiseaux. Il circule aussi bien l'hiver que l'été et nous l'avons souvent pris dans nos pièges pendant la mauvaise saison. Une nuit, dans l'un de nos engins, un Mulot tua son compagnon, lui ouvrit les flancs et dévora une partie des viscères de sa victime. Par un froid intense, par la neige, nous avons vu souvent sa piste facilement reconnaissable : comme il avance par bonds, on remarque l'empreinte de son corps, puis l'endroit où il est retombé et ainsi de suite ; deux petites lignes marquent la place où s'est fait l'effort des membres postérieurs pour porter le corps en avant et, lorsque le saut est peu élevé, la queue qui traîne forme parfois une petite ligne reliant les empreintes successives ; les pistes aboutissent ordinairement aux terriers, aux tas de fumier et de débris. Il quitte ses galeries lorsque la terre gèle profondément et va s'établir dans les fortes haies broussailleuses, sous les tas de fagots, dans les meules de paille, dans les écuries et les maisons, en un mot dans les endroits où il peut trouver un abri contre la rigueur de la température.

Dès les premiers jours de mars, nous avons trouvé son nid sous un tas de fumier, dans une légère excavation qu'il avait creusée et dans laquelle il avait entassé des brins de paille et des herbes sèches, formant ainsi une sorte de boule ; ce nid, près duquel nous avons tué la femelle, contenait quatre petits nus et dont les yeux étaient encore fermés ; près de là gisait une Grenouille agile en partie dévorée. Dans l'estomac de la femelle, nous avons rencontré les débris du Batracien, et dans ses organes génitaux nous avons trouvé quatre embryons minuscules ; cette bête, quoique nourrissant ses petits, s'était accouplée de nouveau. On voit par cette observation que la femelle du Mulot doit faire de nombreuses portées chaque année, la gestation étant de courte durée chez cette espèce.

Ce Rat devient la proie d'une foule de Carnivores et de Rapaces, de quelques Ophidiens et des Chats errants.

29. — Rat nain ou Rat des moissons, Mus minutus - Pallas.

Rat des moissons, Micromys minutus

Parties supérieures fauves, plus claires sur les flancs ; gorge, dessous de la poitrine et ventre blancs ; queue brune ; pieds d'un fauve brun. La coloration fauve est nettement tranchée de la coloration blanche. Tête et corps : 0 m. 070 ; queue : 0 m. 061.

Les jeunes ont un costume un peu plus sombre que les adultes.

Habite les champs et les taillis où il n'est pas rare. Il se loge parfois dans un trou de terre, mais vit le plus souvent dans les fourrés, les fortes haies, sous les tas de paille ou de fumier et même dans les granges. Il mange des graines et des Insectes. Pendant la belle saison, il se construit un nid de forme ronde qu'il suspend à plusieurs tiges de seigle, de froment ou d'avoine, à une branche d'aubépine ou à un brin de taillis. Aux environs d'Argenton, nous avons plusieurs fois trouvé son nid, fixé à 40 ou 50 centimètres du sol, formé d'herbes sèches entrelacées et tapissé dans l'intérieur de bourre végétale ; il contenait ordinairement de quatre à six petits.

La queue de ce Rat étant en partie prenante, il s'en sert pour se soutenir sur les tiges glissantes des céréales.

D'après le Dr Trouessart, la femelle fait plusieurs portées par an, la gestation dure vingt et un jours et à six semaines les petits peuvent se reproduire.

GENRE CAMPAGNOL, Arvicola - Lacépède.

À chaque mâchoire, deux incisives souvent teintées de brun et six molaires munies de proéminences formant des lignes brisées. Tête plutôt grosse ; museau un peu moins allongé que chez le genre précédent ; oreilles plus ou moins velues, de moyenne grandeur et apparentes chez le Roussâtre, le Rat d'eau et le Campagnol des champs, petites et presque entièrement cachées sous les poils chez le Souterrain ; yeux assez petits chez le Roussâtre, le Rat d'eau et le Campagnol des champs, très petits chez le Souterrain ; corps assez allongé ; queue assez courte, peu écailleuse et couverte de poils courts ; membres courts ; doigts munis d'ongles peu recourbés ; le pouce des membres antérieurs est très petit.

30. — Campagnol roussâtre, Arvicola rutilus - Pallas.

Campagnol roussâtre, Clethrionomys glareolus

Parties supérieures d'un roux foncé, flancs d'un brun grisâtre ; parties inférieures d'un blanc parfois grisâtre et très légèrement teinté de roux ; queue d'un brun noirâtre en dessus, blanchâtre en dessous. Tête et corps : 0 m. 105 ; queue : 0 m. 045.

Nous avons capturé assez souvent ce Campagnol aux environs d'Argenton et du Blanc, mais il est peu commun. Il habite les bois, les haies, les champs cultivés, les prés ; nous l'avons pris jusque dans notre jardin. Il fréquente les abords des étangs herbeux, où il devient la proie des Hérons, car on trouve son crâne (facilement reconnaissable des crânes des autres espèces du genre par la présence de racines aux molaires) sur les îlots de joncs secs habités par les Hérons gris et pourprés. Il se cache dans les amas de bois, de pierres, dans les trous des rochers et des vieux murs ; les terriers qu'il se creuse sont peu compliqués et, d'après le Dr Trouessart, il place son nid dans une petite cavité ou à la surface du sol, dans les broussailles ; la femelle fait de quatre à huit petits et a plusieurs portées par an.

Il se nourrit de bourgeons, de fruits et de racines, mange parfois des graines, des Insectes, et dévore les œufs et les petits des Oiseaux qui nichent à terre.

31. — Campagnol Rat d'eau, ou Campagnol amphibie, Arvicola amphibius - Pallas.

Campagnol amphibie, Arvicola sapidus

Brun noirâtre en dessus, gris foncé en dessous. Tête et corps : 0 m. 20 ; queue : 0 m. 12.

Très commun le long des rivières et ruisseaux, sur les rives des étangs et des grandes mares, au bord des fossés et des fontaines. Il n'a pas l'air affairé du Surmulot ; il est moins vif et moins sauvage que ce dernier. Juché sur quelque racine ou gravement assis sur le derrière à l'entrée de son terrier, il digère en paix et laisse ordinairement passer près de lui, sans se déranger, le bateau silencieux qui frôle la rive ; parfois, si on le surprend brusquement, il disparaît dans sa retraite, ou, se laissant choir dans l'eau, il nage doucement le long du bord et va se réfugier sous des racines ou dans un trou ; poursuivi, il déguerpit au plus vite, plonge et nage avec une certaine rapidité. Il se défend énergiquement et n'a pas beaucoup d'ennemis en dehors des Martes et des Putois. Son terrier est peu compliqué et établi non loin de la surface de l'eau ; chaque Campagnol a plusieurs trous qu'il fréquente, et ces retraites sont souvent reliées entre elles par des sentiers battus qui passent sous les racines ou les obstacles, formant ainsi des tunnels plus ou moins longs creusés par le Rongeur.

Il se nourrit d'Insectes, d'Écrevisses, parfois de Poissons et de Grenouilles, mais il mange surtout des racines et des herbes. Le mâle vit souvent en compagnie de deux femelles qui mettent bas plusieurs fois chaque année ; nous avons ordinairement trouvé sept petits dans les organes génitaux de la femelle.

32. — Campagnol des champs, Arvicola arvalis - Pallas.

Campagnol des champs, Microtus arvalis

Brun en dessus, gris clair en dessous. Tête et corps : 0 m. 09 ; queue : 0 m. 03.

Très répandu dans tous les champs, où il vit par troupes plus ou moins considérables. Dans les endroits qu'il fréquente on peut remarquer son terrier, muni de plusieurs ouvertures, dans lequel il passe la plus grande partie du jour. Sa nourriture consiste en graines et racines ; il coupe les tiges du froment, dévore les carottes et autres racines potagères tout en creusant ses galeries ; de même que les autres Campagnols, il accumule dans son terrier des provisions pour les mauvais jours. Nous l'avons souvent pris en amorçant nos pièges d'une prune sèche. Les fortes gelées le chassent de son terrier et il va se réfugier dans les granges, les meules de paille et les haies ; il circule par les grands froids, car nous avons vu bien des fois, sur la neige, sa piste continue, non interrompue comme celle du Mulot, car il trottine et n'avance pas par bonds comme ce dernier. La femelle met bas plusieurs fois par an et fait cinq à sept petits qui sont bientôt en état de se reproduire ; elle construit ordinairement un nid hors de son terrier, dans les fortes haies ou les broussailles.

Ce Campagnol est dévoré par un grand nombre de Carnivores, d'Oiseaux de proie et par quelques Reptiles ; ses ennemis les plus terribles sont la Belette, les Rapaces nocturnes et la Vipère.

33. — Campagnol souterrain, Arvicola subterraneus - Sélys.

Campagnol souterrain, Microtus subterraneus

Parties supérieures brunes ou d'un brun grisâtre ; parties inférieures d'un gris cendré ; queue d'un brun noirâtre dessus, grisâtre dessous. Tête et corps : 0 m. 09 ; queue 0 m. 03.

Pas rare, mais localisé. Il vit presque continuellement sous terre et ne sort guère au soleil, aussi a-t-il un faciès en rapport avec son genre de vie : presque pas d'oreilles, yeux très petits, pelage gris terreux. Nous l'avons observé dans les potagers et dans les prairies des bords de la Creuse et de l'Anglin ; nous l'avons trouvé, à certaines époques, dans la plaine située entre Argenton et le Pêchereau où il se nourrissait de racines de céleri, de carottes et de quelques autres plantes. Il pullulait dans les queues de plusieurs étangs des communes de Lingé et de Rosnay, au milieu des mottes, dans un terrain très humide, où il vivait de racines de plantes bulbeuses ; après avoir été très commun pendant plusieurs mois, il disparut subitement, détruit par un ennemi spécial, peut-être par les Taupes, devenues très nombreuses au même endroit, ou par les Belettes qui visitaient fréquemment le marais où se trouvait la colonie.

Les Oiseaux de proie le prennent peu souvent, à cause de ses habitudes souterraines, mais il doit souffrir du froid ou des inondations, car il n'est pas très répandu.

La femelle fait plusieurs portées par an et met bas, chaque fois, dans son terrier, trois ou quatre petits qui grandissent vite.

Tous les Rongeurs de la famille des Muridés sont des animaux nuisibles.

 


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